Conseil d’administration : témoignage d’un membre

Professeur d’histoire-géographie au lycée polyvalent Schuman-Perret du Havre, Nicolas Huguenin revient pour le Sgen sur le fonctionnement du Conseil d’administration des collèges et des lycées. Il explique pourquoi il est important de voter cette semaine pour en désigner ses représentants.

Dans quelles circonstances es-tu entré au Conseil d’Administration de ton établissement ?

C’était à la rentrée 2016. Le lycée où je travaillais venait de fusionner avec l’établissement d’à côté, un lycée à l’identité très différente. La fusion se passait mal. Les personnels n’avaient pas été consultés et l’ambiance était à la tristesse, mêlée de colère. Tout le monde avait des revendications à faire entendre. Un collègue de physique a monté une liste Sgen et m’a proposé d’y figurer. J’ai dit « oui » et j’ai été élu. C’est d’ailleurs là que j’ai pris ma carte au Sgen.

Pourquoi associer militantisme syndical et participation au Conseil d’Administration ?

Je demandais un mandat à mes collègues. Je voulais être clair avec eux sur la façon de l’exercer. J’ai toujours été proche du Sgen – je votais systématiquement pour la liste que les militants Sgen présentaient. Je n’ai pas eu un gros effort à faire pour adhérer !

Que fait-on dans un Conseil d’Administration ?

Le Conseil d’Administration d’un collège ou d’un lycée est l’assemblée qui prend les décisions importantes de la vie et de l’organisation de l’établissement. Beaucoup de choses ne peuvent être décidées que par lui : le budget, le projet d’établissement, le règlement intérieur… C’est aussi un lieu de débat, en présence des représentants des parents d’élèves, des élèves, des personnels. Enfin, c’est lui qui répartit les rôles dans les différentes instances, comme le conseil de discipline, la commission des appels d’offre ou la Commission d’hygiène et de sécurité, la CHSCT… devenue si importante avec l’épidémie de Covid.

Pourtant beaucoup disent que ce n’est qu’une « chambre d’enregistrement »…

Et les proviseurs, eux, se plaignent que les profs en fassent un bureau des plaintes ! (rires)

Honnêtement, je crois que la réalité est entre les deux. D’abord, il faut mettre de côté toutes les décisions « techniques », qui ne demandent en général pas beaucoup de discussions. Quand on reconduit pour la énième fois une convention de partenariat avec une association, ou un contrat avec une entreprise, on ne s’éternise pas, surtout si ce sont des gens avec qui on travaille depuis longtemps. Et c’est normal.

Sinon, il y a le côté « politique » des choses. Et là, le CA joue un vrai rôle. C’est vrai que certaines décisions lui échappent. Les personnels de l’établissement sont soit des fonctionnaires d’État soit des territoriaux. Leur rémunération ou leur carrière, dépendent d’une autorité supérieure. Et il ne discute pas des réformes des programmes ou de filières. Mais il met en place les conditions dans lesquelles elles se font. Et c’est sacrément important ! Tout comme la question des conditions de travail.

Le CA a donc un vrai pouvoir, d’après toi ?

Oui. C’est le rectorat qui définit les moyens humains et le département ou la région les moyens financiers. Mais c’est l’établissement qui les répartit. Il dispose d’une marge d’autonomie. C’est lui qui définit les priorités de l’établissement : apprentissage des langues, priorités données aux fondamentaux, choix d’options rares, projet d’établissement, projets interdisciplinaires…

Mais tout ça a déjà été décidé par le proviseur ou le principal, non ?

En secret ! Alors qu’au CA, tout se fait dans la transparence. Avec une certaine solennité, aussi. Quand un élu prend la parole au CA, il a une légitimité incontestable. Il est entendu. Quand on a un chef d’établissement qui veut jouer à l’apprenti dictateur, le CA est un contre-pouvoir. Et pas seulement pour les personnels. Les parents ont un rôle à jouer, aussi. Ils peuvent demander des comptes à l’administration de l’établissement.

D’après toi, qu’est-ce qu’un élu Sgen a à apporter spécifiquement ?

Le Sgen-Cfdt est un syndicat réformiste et de propositions. Quand je siège au CA, je cherche toujours à sortir de l’affrontement stérile. Et en général, j’y arrive. Protester, c’est bien. Et il m’est arrivé de le faire. De lire des motions de défiance. Mais proposer, c’est pas mal non plus. Quand un poste doit être supprimé, ou qu’un.e collègue doit faire des heures dans un autre établissement, c’est bien que les élus du personnel puissent intervenir, proposer des solutions alternatives, suivre l’affaire, s’assurer que c’est fait dans le respect des personnes…

Et puis le Sgen est un syndicat généraliste. Au CA, toutes les catégories siègent, et c’est précieux : où, ailleurs qu’au CA, un enseignant peut-il entendre ce qu’ont à dire les agents d’entretien ou le personnel de cantine ?

Un dernier mot ?

Chaque année, je constate un taux d’abstention élevé aux élections au CA. Et en même temps, j’entends les collègues râler parce que la hiérarchie essaie de contrôler leur parole. Ou même carrément de les museler, surtout depuis que Jean-Michel Blanquer est ministre… Voter pour élire ses représentants au CA, c’est avoir la garantie que sa parole sera relayée.