Rapport Longuet : De la colère à la tristesse – billet d’humeur

Pourquoi tant d’acharnement à vouloir démontrer que les profs sont des fainéants, et que tous les maux de l’École sont liés à leur temps de travail insuffisant ?

Rapport Longuet : mépris, violence et méconnaissance des enjeux

Cela semble être en effet le nouveau credo de personnages publics en recherche de sujets faciles et consensuels. Sarkozy qui pointe ces « feignants qui bossent 6 mois par an ». Et maintenant le rapport Longuet qui préconise 20h de service par semaine pour tous… La critique est certes facile… mais elle n’est pas nouvelle ! Chaque prof l’aura expérimenté plus d‘une fois par une petite remarque de son entourage, avec une pointe d’envie, et un soupçon d’humour. Il y aussi, la plupart du temps, un fond de respect envers une profession que chacun en secret reconnaît bien volontiers comme difficile et peu attractive.

Mais aujourd’hui c’est le mépris qui domine dans les préconisations de ce rapport d’une violence inhabituelle. La première réaction est bien la colère face à des propositions provocatrices. Mais c’est finalement la tristesse qui domine devant l’incompréhension profonde de son auteur sur les enjeux que l’École doit affronter.

L’hypothèse implicite serait que l’amélioration de la qualité de notre système éducatif est soluble dans l’augmentation du temps de travail des enseignants.

Comment vraiment améliorer le système éducatif

Pour le Sgen-CFDT, la qualité de l’École est pourtant liée d’abord à la confiance des familles (et plus largement de la société) envers sa capacité à faire réussir tous les élèves. Et le plus important dans un monde complexe et incertain est d’avoir appris à apprendre. Or on en est loin.

L’École française est très discriminante. Les familles qui le peuvent, portées par ces discours négatifs de défiance, tendent à éviter l’École publique. Elles cherchent aussi à trouver des ressources à l’extérieur pour s’assurer de la réussite de leur enfant. Ce rapport qui sous-entend que les enseignants ne travaillent pas assez ne fait qu’accroitre encore ce ressenti.

L’école qui réussit dans les tests internationaux est celle qui tient pour préalable l’éducabilité de tous. C’est celle qui la met en œuvre sans sélection précoce grâce à l’attention portée par les enseignants à leurs élèves (notamment aux plus fragiles). Cette réussite repose sur la qualité des pratiques mises en œuvre, la cohérence des contenus disciplinaires et la clarté des objectifs attendus. Elle repose donc aussi sur une formation initiale solide et un accompagnement permanent des personnels.

Ne pas réitérer les recettes qui ont échoué

Ce rapport se fixe l’objectif de chiffrer les économies réalisables, habillées d’une justification de cohérence par rapport à des références extérieures (autres pays, autres métiers). C’est une publication particulièrement malvenue dans le contexte général de suspicion envers l’École relayée par les médias ou certains ouvrages.

C’est pourtant bien de confiance dont a besoin le pays aujourd’hui. Confiance les uns envers les autres. Confiance surtout envers sa jeunesse qu’il convient de voir comme une chance et non comme une horde de sauvageons à recadrer selon les principes de 1950.

Saboter l’image des enseignants pour faire oublier les résultats médiocres des élèves français aux tests internationaux est une tentative grossière de détournement de l’attention publique. C’est d’autant plus grossier que c’est sur le fondement de la politique éducative portée par F. Fillon. C’est elle qui a été évaluée dans les tests PISA ( voir le portrait de l’élève PISA) et qui révèle un cinglant échec. Il est particulièrement inconséquent de vouloir malgré cela réitérer des solutions qui ont échoué. Surtout si c’est avec comme premier objectif la dégradation des conditions de travail des enseignants.